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Mais, c’est quoi le projet ?
Imaginer la ligne édito d’un magazine pour y lire ce qu’on a l’impression de ne pas trouver ailleurs, ou comment, sans amplifier la cacophonie, joindre sa voix au tumultueux concert de l’arène publique. Disharmonie du conflit : les questions sociétales semblent frénétiquement se succéder à l’agenda de contributeurs au débat qui se radicalisent, et de commentateurs qui s’en délectent. Polarisation à l’extrême, caricature et véhémence nous chiffonnent.
Sur les plateaux des chaînes d’info, sur Twitter, sous les posts des irréductibles de Facebook, des controverses s’enchaînent comme des objets politiques et médiatiques dérisoires, mais toxiques. Société du spectacle hargneuse, aigrie. Chaque jour ou presque, “le web s’embrase”, certes, mais sans doute y a-t-il, derrière les flammes hypnotiques, des personnes et des propos plus intéressants que leur seule capacité d’emballement. C’est pourtant elle et pas grand chose de plus qu’une partie de la presse s’échine à chroniquer. Tentation sensationnaliste et pute à clic, bien sûr, mais le mal n’est peut-être pas que médiatique.
Il paraît de plus en plus compliqué d’offrir un propos qui ne soit sur-interprété, sur-communautarisé, sur-politisé. Manichéisme ambiant, injonction de se positionner : il faudrait systématiquement choisir un camp, et ne pas prendre le risque de la nuance, susceptible de froisser de toutes causes les militants. Si la confrontation des opinions est nécessaire, la véhémence des expressions est une pollution.
On est au jeu du bannissement tour à tour gagnant et perdant, victime et bourreau. Arme traditionnelle de l’extrême-droite, la culture du musellement s’étend sur les réseaux sociaux, au mépris de ce qui fut une certaine éthique de l’internet ouvert – sans excès de nostalgie – et aux dépens de toute aspiration à un exercice apaisé de la démocratie. Facebook et Twitter n’ont pas inventé les effets de bandes, mais se révèlent parfois de cruels excitants pour les “foules psychologiques”.
Facteur aggravant : un déficit de culture numérique persistant et, quand-bien même réussirait-on à percer les bulles de filtre, des acteurs du débat public, citoyens, communautés, qui ne partagent souvent pas les mêmes références, le même humour, la même grammaire, et ont du mal à se comprendre avant d’essayer de s’entendre. De nouvelles formes d’engagement, d’acculturation politique, passionnantes, se développent alors assez hermétiquement du reste de la société, qui ne s’enrichit pas de ces isolements.
Faut-il être pessimiste pour autant ? Surtout pas, et c’est le pourquoi de CTRLZ : chercher les points d’équilibres, persuadés qu’ils sont trouvables, questionner les éclats de voix, guetter les convergences quand n’émergent que les dissensions. Réfléchir aux transformations des idées, des discours, des comportements, en surface comme en profondeur, et à la manière dont les générations post-internet tentent de prendre le contrôle, sinon de la société, de leur destin. Interroger des chercheurs qui travaillent sur ces sujets, aussi. Essayer de décrypter les phénomènes de mobilisation contemporains et, qui sait, d’anticiper les prochains.
À bientôt, et d’ici-là, n’hésitez pas à parler de nous !